Sur la trace des levures hybrides
17/12/2020
L’équipe de Joseph Schacherer, du laboratoire Génétique moléculaire, génomique et microbiologie (GMGM) a participé à une étude, publiée dans la revue Nature, ayant pour objectif d’élucider l’origine des introgressions chez les levures.
En génétique, le terme d’introgression désigne le transfert de gènes d’une espèce au génome d’une autre par le biais d’une hybridation. C’est un phénomène qui se retrouve à travers tout le règne animal, y compris chez l’Homme. « Il existe plusieurs cas d’introgressions observés chez l’être humain. En 2014 par exemple, des chercheurs ont montré que la meilleure adaptation des Tibétains à l’altitude provient d’une partie de leur génome héritée de l’homme de Denisova », raconte Joseph Schacherer.
Le chercheur et son équipe sont spécialisés dans l’étude de la génomique des populations et ont déjà publié une étude dans laquelle ils analysaient le génome de plus de 1000 individus au sein de l’espèce de levure Saccharomyces cerevisiae. « Nous remarquions déjà la présence de morceaux d’ADN d’une espèce proche, Saccharomyces paradoxus, chez certains des individus séquencés mais sans connaître les mécanismes qui sous-tendent le processus d’introgression. »
Avec l’équipe de Gianni Liti, de l’Université de Nice Sophia Antipolis (CNRS, INSERM, IRCAN) avec laquelle ils collaborent de longue date, les chercheurs du GMGM (Université de Strasbourg, CNRS) ont cherché à remonter à l’origine de cet événement d’hybridation génétique pour pouvoir en analyser le déroulement.
Un fossile comme point de départ
« En 2018, en séquençant le génome de 1011 isolats de l’espèce Saccharomyces cerevisiae nous avions rencontré plusieurs hybrides viables bien que issus d’espèces différentes. Ce sont eux que nous avons utilisé comme point de départ pour cette étude », explique Joseph Schacherer.
En remontant jusqu’à un « fossile », un ancêtre hybride porteur de quelques gènes de Saccharomyces paradoxus, les chercheurs sont parvenus à déterminer les mécanismes qui sous-tendent les introgressions. « Il y a d’abord une reproduction entre individus d’espèces différentes mais proches, par exemple entre l’Homme moderne (Homo sapiens) et Néandertal, puis plusieurs générations de reproduction à l’intérieur de l’espèce pour parvenir à ces individus dont le génome est majoritairement Homme mais avec une particularité génétique. C’est ce parcours jusqu’à ces individus que nous avons analysé. »
A l’avenir le chercheur aimerait s’intéresser aux phénomènes d’adaptations qui favorisent ou non certains traits génétiques et en font disparaître certains.
Léa Fizzala
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