« J’aime les défis, j’ai vu ce concours comme une opportunité de formation et d’ouverture au monde de l’entreprenariat, un moyen de penser et de réfléchir hors des murs du laboratoire. » En mai dernier, Salima El Yakhlifi a eu 15 minutes pour présenter son projet devant une dizaine de jurés représentant de Conectus et d’acteurs du monde socio-économique. « J’étais très impressionnée », sourit la jeune femme qui a également eu l’occasion de défendre son sujet lors de la finale alsacienne de ma Thèse en 180 secondes.

Brevetabilité et étude de marché

Sélectionnée avec trois autres candidats, elle va pouvoir bénéficier du programme Mature your PhD pour sa troisième année de thèse. Etudes de marché, brevetabilité… « Ça permet d’avoir une expertise socio-économique. Nous aurons également une formation entrepreneuriale », détaille Salima El Yakhlifi qui effectue ses recherches sous la supervision de Vincent Ball. Son sujet ? « Le contrôle de la structure et des propriétés de la polydopamine en suspension, en film et en gel pour des applications biomédicales. »

« Les moules sont connues pour adhérer sur tous types de surfaces même en condition humide, cette capacité présente un intérêt dans le domaine médical. En s’inspirant des molécules présentes dans les moules, les chercheurs sont parvenus à créer un matériau proche appelé polydopamine qui colle à quasiment toutes les surfaces », résume la chercheuse touche à tout qui apprécie le domaine des biomatériaux à l’interface de la physique, la chimie et la biologie.

Une colle chirurgicale

Durant sa première année de thèse, Salima El Yakhlifi développe des nano-particules de polydopamine de taille contrôlée et stable en s’inspirant de la structure de la mélanine. Sans oublier de leur conférer une activité enzymatique qui permet d’initier des réactions comme diffuser des médicaments. Sa deuxième année porte sur le développement de films. « La polydopamine est un matériau biocompatible aux diverses propriétés, que l’on peut plus ou moins contrôler selon l’oxydant utilisé. J’ai comparé les différents protocoles et créé de nouveaux afin de déterminer la meilleure recette pour avoir par exemple des films plutôt hydrophobes ou antioxydants selon l’application souhaitée… »

En parallèle et jusqu’à la fin de sa thèse, Salima El Yakhlifi s'est attaquée au développement d’une colle chirurgicale à base de polydopamine. « Les colles actuelles ont des lacunes, elles adhèrent mal, ont des problèmes de biocompatibilité qui peuvent créer des réactions, elles peuvent également être difficiles à mettre en place. C’est un axe de croissance dans le marché du traitement des plaies pour remplacer notamment la suture, un corps étranger qui présente des limitations comme des infections post-opératoires », explique la doctorante qui, grâce à Conectus, pourrait bénéficier d’un financement en maturation puis à terme participer à la création d’une start-up et amener son produit sur le marché. « Le but du chercheur est d’améliorer le monde dans lequel il vit. C’est important de se connecter à la réalité », conclut la jeune femme.

Marion Riegert

• Pour aller plus loin lire aussi notre sujet : "Les moules pour créer des pansements connectés"