La co-création, une solution pour arrêter de fumer ?
31/10/2018
10 millions de français veulent arrêter de fumer sans y parvenir. Ameni Ben Jebril, doctorante au sein du laboratoire Humans and management in society (Humanis), décide de s’attaquer à ce sujet de société au côté de sa directrice de thèse Sihem Dekhili il y a deux ans à travers un angle original : celui de la co-création. Un phénomène favorisé par internet et le développement des réseaux sociaux particulièrement visible au mois de novembre : un « Moi(s) sans tabac. »
Exit le patient passif recevant une prescription. Le fumeur doit devenir acteur. « Il a été montré que les différentes campagnes anti-tabac étaient inefficaces vis-à-vis de certains profils. La co-création, c’est un travail collaboratif basé sur l’échange et la discussion», souligne Ameni Ben Jebril, jeune chercheuse qui a choisi de se pencher sur ce phénomène suite à la mort d’un de ses proches.« J’ai des amis qui fument, l’un d’eux en est mort. Ils ont toujours dit qu’ils voulaient arrêter, sont conscients des risques, mais n’y arrivent pas. »
Tabacologue, hypnothérapeute, pneumologue, psychologue… Pour comprendre les mécanismes de la dépendance, Ameni Ben Jebril est partie à la rencontre de 12 professionnels de santé qui accompagnent les fumeurs. Tout l’enjeu pour eux étant d’arrêter la cigarette de manière durable. « Nous sommes dans le domaine de l’addictologie. La dépendance psychologique des patients est très importante. Les professionnels de santé sont là pour les accompagner et leur proposer différentes méthodes de traitement, mais ce sont eux qui choisissent celle qu’ils préfèrent », explique Ameni Ben Jebril qui note une révolution du côté des patients : « plus informés, engagés et responsables. »
La marche nordique pour arrêter de fumer
Pour elle, le tabagisme est vécu comme une expérience. « Appartenance à un groupe, envie de grandir… Chacun a son histoire, un vécu avec sa première cigarette. L’idée de la co-création, c’est aussi de faire de l’arrêt de la cigarette une autre expérience de vie positive et partagée. » Un phénomène rendu possible grâce à internet et aux réseaux sociaux. Tout un champ d’étude qu’Ameni Ben Jebril scrute depuis avril. « J’ai découvert le témoignage d’un internaute, photos à l’appui, qui a essayé la marche nordique pour arrêter de fumer. »
Ces partages d’expériences développent de l’enthousiasme et véhiculent le bonheur et la fierté de ceux qui ont réussi à l’image de l’administrateur d’un forum ayant arrêté de fumer depuis 4 ans. Ce dernier soutient et encourage les nouveaux entrants. « Il y a un sentiment de bien-être, la personne va se sentir écoutée, valorisée. » Du 1er au 10 octobre, un mois avant le début du Moi(s) sans tabac, Ameni Ben Jebril note déjà un pic des échanges. « Plus de 30 personnes sont entrées dans un des forums du Moi(s) sans tabac. » L’occasion de se lancer dans le défi de manière collective et d’écraser sa cigarette pour de bon.
Marion Riegert